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ENERPAT : « J’ai toujours considéré que lorsque l’on voulait rendre une ville attrayante, on devait d’abord commencer par ce qui a le plus de valeur, notamment la valeur historique (...). En général, celle-ci réside dans son coeur historique."

Catégorie Gestion des projets approuvés

Cette semaine nous avons interviewé M. Jean-Marc Vayssouze-Faure, Président de la Communauté d’agglomération du Grand Cahors et chef de file du projet Enerpat, qui nous a parlé de ce projet emblématique sur la réhabilitation énergétique des bâtiments anciens des centres historiques.

Photo: ©Ville de Cahors / Grand Cahors – P.Lasvènes 

1.  Dans quelle mesure un projet tel qu’Enerpat répond aux enjeux d’une ville comme Cahors ?

Enerpat fait suite à une stratégie mise en place progressivement dans la ville de Cahors, visant à une centralité majeure. J’ai toujours considéré que lorsque l’on voulait rendre une ville attrayante, on devait d’abord commencer par ce qui a le plus de valeur, notamment la valeur historique, celle qui constitue notre identité. En général, celle-ci réside dans son cœur historique, dans son centre-ville. Il était donc important que nous rénovions le centre historique de Cahors qui avait été délaissé car, comme dans la plupart des villes de cette même taille, nous avions privilégié la construction et l’étalement urbain, moins cher et plus facile. Cette action n’est évidemment pas simple à mener car il ne faut négliger aucun des champs d’interventions possibles de la collectivité. Nous avons donc décidé de travailler sur l’habitat et les espaces publics avec une politique de rénovation très forte. A l’heure actuelle, toutes les rues et toutes les places de Cahors sont en cours de rénovation : nous avons mis en œuvre des programmes de tranquillité publique, nous avons revu la politique de circulation et stationnement, nous promouvons le commerce de centre-ville et nous privilégions la mise en place d’équipements publics en centre-ville. Aujourd’hui, par exemple, l’hôpital de Cahors se trouve en centre-ville tout comme les administrations ou encore les équipements culturels. Nous avons aussi décidé de rénover le musée Henri Martin et de construire un complexe cinématographique.

Par ailleurs, un autre élément fondamental d’Enerpat est la qualité d’habiter car pour attirer des populations dans le centre-ville, notamment les familles et populations actives, il faut pouvoir garantir une qualité d’habiter qui soit compatible avec les conditions de modernité et confort requis par les habitants. Dans ce sens, il demeure important de savoir comment allier la performance énergétique d’un bâtiment au respect du patrimoine. Nous n’avions jamais travaillé dans ce secteur car avant, pour améliorer la performance énergétique d’un bâtiment, on avait recours à l’isolation par l’extérieur. Or, celle-ci ne met en valeur ni la qualité patrimoniale ni l’identité d’architecture des bâtiments. Au travers d’Enerpat et des bâtiments démonstrateurs, nous avons pu travailler sur des techniques de matériaux bio-sourcés et d’éco-rénovation, bénéfiques tant à la performance énergétique qu’à la mise en valeur de notre patrimoine.


2.  Les bâtiments visés sont des pilotes : pensez-vous étendre cette démarche à d’autres bâtiments ?

Oui car nous avons encore des bâtiments emblématiques qu’il faudra rénover en nous appuyant sur les expériences d’Enerpat et en développant de nouvelles techniques car chaque bâtiment a ses particularités. Je pense notamment à l’ancienne prison, un bâtiment extraordinaire et abandonné, sur lequel pourront être testés techniques et matériaux pour valoriser le patrimoine et garantir le confort de l’habitat.


3.  Selon vous, quel sont les enjeux actuels et futurs concernant la préservation et dynamisation des centres historiques ? Comment ajuster les politiques dans le domaine aux réalités du terrain ?

Les enjeux sont d’inverser les tendances. Les villes de notre taille, qui ne bénéficient plus de la dynamique démographique, ont vidé leur centre historique en habitants, en commerces. Et pourtant, c’est là où se trouve l’âme d’une ville. André Malraux disait que les centres villes étaient les visages de la France. Or, on les abandonne. Beaucoup de centres historiques sont précarisés, avec énormément de logements vacants. C’est donc un enjeu national : que voulons-nous faire de nos centres villes, de notre histoire ? Est-ce que nous devons continuer de favoriser l’étalement urbain qui pose des difficultés en termes de développement de l’espace et de réseaux ? Les difficultés ici sont liées à la compacité qui affecte le vivre ensemble, la tranquillité publique, le civisme. Il y a aussi des problématiques liées aux inondations. A ce jour, les règlementations ne sont pas adaptées à ce problème. Et à Cahors, la réalité est que nous devons vivre avec la rivière et donc, diminuer les risques. Il y a aussi la problématique des découvertes archéologiques : en aménageant, on retrouve des vestiges qui doivent être gérés. Il faut qu’il y ait des analyses rapides, des aides aux propriétaires. Tous ces éléments requièrent une adaptation. La rénovation est toujours plus dure à mener mais c’est tellement intéressant ! Elle crée votre valeur ajoutée. Par exemple, lorsque l’on construit du neuf, on construit toujours la même chose, voyez les entrées des villes européennes qui se ressemblent toutes. Il faut être en capacité de privilégier la rénovation plutôt que de faire de la construction, sans se priver de la modernité, en privilégiant des matériaux issus du territoire et plus nobles.


4.  Le projet porte sur des centres villes d’agglomération de tailles différentes : dans quelle mesure la coopération avec d’autres villes situées dans d’autres pays, avec des problématiques surement différentes, bénéficie le développement de Cahors ?

Nous avons toujours intérêt à pouvoir échanger, partager. Les situations sont toujours un peu différentes en fonction des villes. Concernant la rénovation du patrimoine, on va retrouver des problématiques communes et il est important de les réfléchir ensemble, d’avoir des expériences pilotes que l’on puisse partager. C’est quelque chose de très intéressant : on s’appuie sur ce qui a été fait ailleurs et on devient un territoire d’expérimentation ce qui est valorisant.


5.  Enerpat est un projet sur l’efficacité énergétique : quel(s) autre(s) projet(s) ou idée(s) développez-vous dans ce sens ?

Aujourd’hui, nous nous concentrons sur l’amélioration de la performance. Par exemple, nous nous sommes posés la question sur les énergies renouvelables. On ne peut pas mettre du photovoltaïque dans un centre historique comme sur un bâtiment neuf et isolé.  Du coup, on travaille avec els architecte de France pour inclure le photovoltaïque dans le patrimoine.

Il faut aussi travailler sur l’acoustique : il faut des isolations phoniques de bon niveau qui soient compatibles avec le respect du patrimoine.

Il y a ainsi un large champ lié à la qualité d’habiter qui reste à explorer pour donner envie aux habitants de revenir aux centres villes. Les avantages sont nombreux et affectent la façon d’habiter et la société à laquelle nous aspirons. Il faut travailler sur des logiques du vivre ensemble.


6.  Le projet touche à sa fin : quelle suite envisagez-vous ?

Nous avons encore beaucoup de travail à faire. Nous allons continuer à travailler et optimiser les techniques et savoir-faire. IL y a encore beaucoup de choses à développer pour améliorer la qualité d’habiter, le vivre ensemble et la présence des commerces.